Clair
Du latin clarus, clara, clarum, clair, illustre.
Ni sourd ni obscur
Le latin clarus s'est certainement d'abord appliqué à la voix et aux sons.
Clara vox (une voix claire ).
Le sens de clarus s'est ensuite étendu aux sensations de la vue, clara lux ( une lumière claire).
Puis l'adjectif s'est appliqué aux choses de l'esprit, clara consilia (un
conseil clair).
Enfin, il s'est appliqué aux individus, clarissimus vir, un homme très *clair. Un sens que le français n'a pas conservé. Il nous faut traduire par un homme
célèbre, illustre. Cependant, le français a gardé l'antonyme, obscurus, obscur. Obscurus vir sera sans problème traduit par un homme obscur.
Clair et déclarer
Déclarer c'est manifester, annoncer à voix haute et …claire !
D'une voix qui retentit, d'une voix qui frappe l'oreille.
Être clair, parler clair, n'est-ce pas avant tout se bien faire entendre, se faire bien comprendre ?
Des propositions claires ne devraient-elles pas être pures, lumineuses ?
Sans ambiguïté aucune ?
Comme il serait bon de voir tous les orateurs publics se souvenir de cette origine ...
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Isamatelote
Le verbe clamer et ses composés( acclamer, déclamer, s’exclamer, réclamer,) ou encore le nom clameur ne viennent pas directement du latin clarus, mais de clamare, pousser des cris, formé sur la même racine que clarus.
Comme j’évoquais le sens de la racine grecque rh, qui coule, donnant quelques exemples (Rhin, Rhône, rhume, logorrhée etc.), mes interlocuteurs me proposèrent Rhésus. Le sang coule, me dirent-ils. J’étais quelque peu sceptique. Rhésus me semblait être le nom d’un homme lié à la découverte du facteur. Et puis sémantiquement rhésus en lui-même n’évoque aucune idée d’écoulement, de fluidité.
Doute oblige, je vérifie. Le facteur Rhésus a été baptisé du nom de l’espèce des singes qui servirent à mettre en évidence ce « facteur agglutinogène, dont la présence ou non dans le sang détermine le groupe sanguin » (TLF).
Laquelle espèce de singe a elle-même été arbitrairement baptisée par les zoologistes (1799) du nom d’un roi légendaire de Thrace, Rhésus ou Rhésos. Un ami de Pâris qui fut égorgé par Diomède et Ulysse avant qu’ils ne puissent porter secours aux Troyens. Et savez-vous de qui il est le fils ? D’un fleuve ! Nous voilà donc à la source même de la racine RH du facteur rhésus.
Cette petite histoire est instructive. N’avoir jamais de certitudes sans avoir remonté le long cours de l’histoire d’un mot, mener sa barque doucement et sûrement. Mais ne jamais non plus s’interdire aucune interrogation, s’autoriser bien au contraire toutes les curiosités, tous les « pourquoi pas », tous les « et si ... » aussi farfelus puissent-ils sembler à condition de ne pas s’arrêter là, se croyant arrivés à bon port, mais d’entreprendre par le voyage vers la source. Et si elle n’est pas du tout là où on la croyait, qu’importe ! On aura fait un beau voyage.
Isabelle
Et pour ceux qui voudraient explorer les alentours de la source, un petit tour mythologique :
Rhésus, roi de Thrace, était le fils du fleuve Strymon. Après s’être illustré par ses exploits en Europe, il vint au secours du roi Priam (roi de Troie) qui l’attendait d’autant plus
impatiemment qu’un ancien oracle avait prédit que Troie ne serait jamais prise si les chevaux de Rhésus buvaient les eaux du Xante et paissaient dans les champs troyens. Les Grecs, qui
connaissaient cet oracle, chargèrent Ulysse et Diomède d’arrêter la marche de Rhésus. Ces deux héros, ayant pénétré dans son camp à la faveur de la nuit, l’égorgèrent et enlevèrent ses chevaux.
(Source, Dictionnaire pour servir à l’intelligence des auteurs classiques grecs et latins).