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LES P'TITS MOTS -PASSION

le baiser de Constantin Brancusi
le baiser de Constantin Brancusi

 

Baiser,

du latin basiare, embrasser

 

Le baiser

Le première "baiser" de la langue française est le mot qui désigna le geste par lequel Judas désigna Jésus aux soldats. Baiser de traître. C'est donc dans les écrits religieux qu'il apparaît. Il se généralise ensuite dans la langue profane. Baiser du vassal à son suzerain lors de la cérémonie de l'hommage. Baiser du chevalier à sa dame.

 

Baiser est resté un nom couramment employé. Un nom qui a bonne presse et qui désigne toujours un même acte, celui d'appliquer sa bouche sur …, même s'il est des nuances ! C'est l'adjectif qui se chargera de nuancer ... rendant le baiser  tendre, passionné, enflammé, érotique même.

 

Mais le verbe n'a pas connu le même destin. Son sens s'est aujourd'hui tant éloigné du nom qui lui correspond,  qu'il a fallu le remplacer par le verbe embrasser : je donne un baiser, j'embrasse et non plus comme autrefois je  baise !

 

De donner un baiser

C'est que les amants, qui tant aimaient, aimaient baiser et les mains, et le visage, et la bouche, et ... de fil en aiguille …. baisèrent, tout simplement ! Qu'importe ce qu'ils baisaient, il était inutile de le préciser ! Ils s'embrassaient tout partout, tant et tant que le verbe "baiser" a fini par exprimer tout l'acte d'amour, cet acte que dictait la tendresse et le désir. 

" Sur mol duvet assis, un gras chanoine

A son costé gisant dame Sidoine

[...] Boire y pocras, a jour et a nuytes,

Rire, jouer, mignonner et baisier,

Et nu a nu, pour mieulx des corps s'aisier

, Les vy tous deux, par ung trou de mortaise"

Villon

 

... à posséder charnellement

Mais de fil en aiguille … ceux qui tant se désirent, s'unissent. Remarquez comme je dis. S'unissent. Vous voyez, je ne dis pas, "font l'amour", ou tout autre expression … c'est que je suis pudique. J'utilise un euphémisme.

C'est par euphémisme aussi que la langue employa le verbe "baiser" pour signifier " posséder charnellement". Curieux, non, quand aujourd'hui le verbe manque d'élégance !

Baiser veut bien dire ce qu'il veut dire dès le 15ème siècle. Un certain Gordon a écrit à cette époque :

"… la cause de satiriazis foraine ce peut estre forte ymaginacion envers aulcune femme pour habiter ou pour baiser " c'est à dire, accomplir l'acte sexuel. C'était dans la seconde moitié du XVème siècle."

Pendant une longue période, et surtout au 16ème et 17ème siècle, le verbe garda les deux sens, celui d'embrasser, et celui de "posséder charnellement".


Un double sens dont les auteurs ne se sont pas privés comme ressort du comique. On rit quand on entend dans Molière "baiserais-je, mon père ?"

 

Un mot qui manque d'élégance !

Baiser pour désigner l'acte sexuel est devenu " populaire", voire " peu élégant". Pourquoi donc, alors que c'était justement une façon adoucie de "dire la chose" ? C'est que le mot a tant bien "dit la chose", qu'il a été associé à "la chose", et la chose, Ô la chose ! n'était pas dicible ! Le mot suivit le même destin, et fut chassé du vocabulaire châtié.
Mais il resta dans le langage du Peuple qui, ma foi, n'a pas fait tant d'embarras ! Du coup, le mot est a été déclaré "populaire"…. Et aujourd'hui n'a pas vraiment bonne presse.

 

 



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Isamatelote

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